Elles réclament, aussi, un droit à l’enfant pour tous

Article : Elles réclament, aussi, un droit à l’enfant pour tous
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4 novembre 2012

Elles réclament, aussi, un droit à l’enfant pour tous

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La future loi sur le mariage pour tous en France marque la réalisation d’une promesse de campagne du candidat Hollande. « Les Enfants d’Arc en ciel – l’asso ! » reçoit en majorité des couples lesbiens pour les accompagner dans leur projet parental. Elle s’inquiète du décalage entre les engagements de la loi  d’une part, et le statut et la considération de la mère homosexuelle d’autre part.

« Nous ne sommes pas que des baby-sitters ! », s’écrit Nathalie Mestre, présidente de l’association LGBT « les Enfant d’Arc en ciel ». Le projet de loi sur le mariage pour tous semble loin de régler les problématiques qu’elle rencontre chaque jour.  Lors des auditions participatives avec la ministre de la Justice en septembre dernier, cette professeure des écoles a martelé les revendications de son association. Le ton est donné, les couples de lesbiennes (comme les couples gays) veulent l’égalité au regard de la filiation.

Elle faisait partie des 60 engagements de François Hollande. Le 26 janvier dernier, le futur président de la République a promis un « droit au mariage pour les couples homosexuels. » Le 10 octobre 2012, le premier ministre, Jean-Marc Ayrault, a annoncé que le texte serait examiné en Conseil des ministres entre fin octobre et début novembre,   « mais ne concernera ni la procréation médicalement assistée ni l’adoption conjointe. »

Une avancée encore bien limitée pour les couples homosexuels

Nathalie Mestre ne veut même pas entendre parler « cette adoption là ». Pour elle, ce projet de loi ne résout rien puisque « les couples homosexuels vont se retrouver dans une obligation de se marier pour avoir droit à adopter. On enferme le droit à l’enfant dans le mariage. »

D’après les rumeurs, le texte serait actuellement en relecture au Conseil d’Etat et il ne serait pourtant pas question d’adoption. Pour Me Alain Devers, maître de conférence, membre du Centre de droit de la famille à l’Université Lyon 3, « une promesse présidentielle est un choix politique. Le mariage entre deux personnes du même sexe est une question de société qui pourra être acceptée avec le temps mais la filiation… » Selon cet avocat du barreau de Lyon, « le projet de loi sur le mariage pour tous ne concerne que le couple. Les questions d’enfants sont exclues. » Un pavé dans la mare alors que Christiane Taubira – porteuse du projet de loi – avait annoncé dans les colonnes de la Croix, le 11 septembre dernier, que les couples de même sexe pourront, comme les couples hétérosexuels, « adopter de façon individuelle ou conjointe (de façon simple ou plénière) ».

Même si déjà, la Garde des Sceaux avait, à cette même occasion, exclut expressément la PMA du « périmètre de la loi », l’adoption, elle, restait toujours dans le débat.

La PMA : une question de femme au regard du droit à l’enfant

Les associations LGBT comme « les Enfants d’Arc-en-ciel » attendent bien plus qu’une loi a minima. Adoption ou pas adoption, Nathalie Mestre ne semble pas être au courant. Elle se cramponne à l’idée que le projet de loi, tel qu’elle en a eu connaissance n’est pas satisfaisant en matière de filiation. Elle accuse la France de s’être déjà délié de ses engagements légaux pour les parents hétérosexuels ayant recours à la PMA. Selon elle, lors d’un recours aux gamètes issus de dons, personne n’a jamais demandé au parent stérile d’adopter l’enfant fruit de ce mode de procréation assistée. « C’est la différence avec le couple homosexuel, quelle inégalité ! Dans un couple de personnes de même sexe, l’autre parent doit aujourd’hui faire une demande de délégation parentale, pour se voir reconnu comme tel, et demain (avec ce projet de loi) effectuer une demande d’adoption. »

Mais à réclamer l’égalité parfaite, les associations LGBT ne se heurtent-elles pas à des limites juridiques ? En effet, le procédé de procréation médicalement assisté est aujourd’hui envisagée comme remède à la stérilité du couple, et non pas comme la réponse au désir d’enfant. Accorder aux couples homosexuels, précisément aux couples de lesbiennes qui seules peuvent porter un enfant, un droit à la PMA reviendrait à généraliser un procédé réservé à une minorité de couples en difficulté pour avoir un enfant. « Nous voulons ouvrir la PMA à toutes les femmes de France », déclare Nathalie Mestre. Ce vœu se retrouve pourtant confronter à des objections.

Jean-Christophe Lagarde s’est exprimé en faveur du mariage et de l’adoption pour les homosexuels mais contre la procréation médicalement assistée auprès de 20minutes.fr. Pour le député (UDI) de Seine-Saint-Denis, « le mariage et l’adoption c’est le code civil, la PMA, c’est le code de la santé. Par cet amendement, les députés socialistes transforment la PMA qui est un acte médical, en un acte social, un acte de confort. »

Mais Me Devers rappelle, comme pour l’exemple de la loi sur le PACS en 1999, que « le même texte peut aborder les divers aspects (couple et enfant). En l’occurrence une modification du code civil avec les dispositions sur le mariage et, les dispositions relais, dans le code de la santé publique avec les dispositions sur la PMA. » En définitive, l’insertion dans la loi sur le mariage pour tous d’un droit à l’enfant pour tous est bien possible, mais dans ce cas « ce serait une véritable révolution », conclut Alain Devers.

Aurélie M’Bida

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